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Le fils Bongo hérite du contrat de métayage de son feu père Omar Bongo. Par Rodrigue KPOGLI
Voilà ! C’est fait. Ali Ben Bongo, le fils du vieux crocodile françafricain décédé en juin dernier après 41 ans de règne, est officiellement reconnu président du Gabon. Les résultats du cirque électoral ont été proclamés ce midi et au nom du père et avec l’onction de la France, le bonhomme aux cheveux défrisés l’emporte avec 41,73% devant André Mba Obame et Pierre Manboundou. La monarchie est désormais établie au Gabon. En tout cas, pour le moment. Faure Gnassingbé du Togo a trouvé de la compagnie. Et le rang de ce mouvement ira en grossissant avec la maturation à l’ombre de projets similaires pour d’autres territoires africains avec le concours total de la France et de toutes les forces néo-impériales pour qui la « démocratie est un luxe pour l’Afrique ». En clair, l’humiliation, le viol des Africains et le pillage de leurs terres ne doivent jamais avoir une solution de continuité.
A la veille de ce cirque électoral, quelques hypocrites et cyniques drapés de leurs toges de journalistes, faisant semblant d’ignorer que le choix d’Ali Bongo était un acquis, demandaient à leur douce France de rester neutre dans le processus électoral au Gabon. Certains, doublement cyniques, à travers des articles clairement ambigus, faisaient semblant d’appeler la France à soutenir la démocratie dans ce pays. Toutes ces proclamations et exhortations visaient à se donner bonne conscience et à clamer au moment opportun que seuls les Gabonais ont choisi de monarchiser leur pays alors que la France y a été impartiale ou qu’elle y a même soutenu la démocratie. Dans le même temps, on n’a cessé d’écrire, de dire, images à l’appui qu’Ali Bongo est « le favori pour diverses raisons » de ce scrutin. Cette incessante affirmation qui, en réalité, était la décision définitive de l’Elysée et de ses alliés multinationales, a fini par énerver Pierre Manboundou qui dans une sorte de rugissement de tigre édenté, a assené le 19 août 2009 à Sylvain Attal de France24 que « Ali Bongo n’est favori de personne ici au Gabon. Il faut que cela soit clair. Il est peut-être favori pour France24 mais pas pour les Gabonais ». Jolie mise au point. Mais, Monsieur Manboundou, les jeux étaient faits depuis longtemps à l’Elysée et ailleurs sans le consentement des Gabonais, d’ailleurs « immatures pour la démocratie » à l’instar des Congolais, des Camerounais, des Togolais, des Burkinabé, des Tchadiens…
Aujourd’hui, après le Congo où Sassou Nguesso est reconduit tranquillement au pouvoir, le Niger où Mamadou Tandja a défait les fragiles institutions les unes après les autres, Total, Areva et les vautours mafiafricains viennent de réaliser la succession dynastique au Gabon comme hier, au Togo. Pour arriver à leurs fins, ces vampires ont gonflé le corps électoral porté à 820.000 électeurs sur une population réelle d’environ 1,3 millions. Ils ont ensuite utilisé tout le pouvoir financier que leur a procuré le long règne du pion Bongo Ondimba qui a pris le soin de préparer soigneusement et patiemment sa succession. Ils ont utilisé l’armée avec la complicité du 6è BIMA et de la base aérienne française pour terroriser les patriotes en agissant sur les leviers de la répression et des intimidations. Ils ont fait recours à l’usuelle pratique du bourrage d’urnes. Ils ont aussi et surtout utilisé les médias nationaux et internationaux pour faire l’idée que quoiqu’il se passe, Ali Bongo était le favori, malgré les contestations dont il est l’objet dans le pays y compris jusque dans le parti de son père, le PDG (Parti démocratique Gabonais) dont le bilan est plutôt catastrophique malgré l’énormité des richesses de cette partie de la terre africaine. Malgré les 41 ans de Bongo, voilà que les Gabonais en redemandent. Tout ceci pour faire passer les Noirs pour des grands enfants inconscients ou des bêtes insensibles à la douleur et qui « votent » pour leurs propres bourreaux.
Dans cette conquête qui n’en est pas une dans les faits, tous les réseaux ont été mobilisés pour avaliser le fils à papa au sommet du pays. Change-t-on une équipe qui fait gagner ses propriétaires et parrains ? Evidemment pas ! Robert Bourgi, « le Monsieur Afrique » de Sarkozy a d’ailleurs parié sur le fils Bongo. Cela veut tout dire !
Omar Bongo Ondimba, en bon pion français a passé toute sa vie à financer les partis politiques en France de l’extrême gauche à l’extrême droite au point de trouver inutile voire dangereux de bâtir un centre de santé digne de ce nom pour ses propres besoins et ceux de son clan dans son pays natal. Lui, Omar qui a tout donné à la France, n’avait pas supporté l’ingratitude de celle-ci. Et, pour sanctionner les révélations de ses turpitudes financières et l’étalage de ses biens mal acquis en France, Omar Bongo est parti mourir en Espagne. Aller mourir non pas en France, mais ailleurs était le châtiment le plus infâme qu’en digne fils, le nano-président a estimé infliger à son mentor. Quel intérêt ont-ils, tous ceux-là qui ont volé, appauvri les Gabonais et financé leurs outils politiques ou se sont enrichis de rompre le cycle ? Aucun ! Et la meilleure façon de s’assurer que les richesses de cette partie de l’Afrique restent leur propriété exclusive, c’est de confier le contrat de métayage du père au fils. [1]
Tous les Africains sont interpellés par la dérive monarchique en œuvre aujourd’hui en Afrique. Les réactions doivent être fortes et radicales. Car, de la façon dont un peuple, dans son entièreté se comporte face aux affronts et déstabilisations qu’il subit dépend leur perpétuation ou non. Le peuple noir ne peut pas et ne doit pas continuer à être l’oiseau qu’on plume pour couvrir les autres. A force de se laisser plumer, nous finirons tous nus. De tout temps, l’Afrique a servi et nourri les autres et pas les Africains eux-mêmes. La concurrence liée aux enjeux du monde d’aujourd’hui va de toute évidence aggraver la situation de l’Afrique. C’est là que le peuple noir doit sortir de ses gongs et travailler pour mettre hors d’état de nuire tous les guignols qui, au terme d’incessants viols, sont faits « gouvernants » avec comme cahier de charges de continuer l’œuvre coloniale de la démolition de la société africaine. Ce combat ne sera pas de tout repos. Il sera périlleux, mais c’est le nécessaire et unique chemin pour le peuple noir d’espérer guérir les douleurs à lui infligées par la complicité de certains de ses propres fils aliénés et kleptocrates s’offrant, en plus de leur incapacité, des vacances dont les frais d’hôtel uniquement vont de 655 millions CFA (Paul Biya en France) pour les uns à 750 millions CFA pour les autres (Abdoulaye Wade en Suisse et en France).
Tous ceux-là qui vampirisent l’Afrique veulent nous convaincre que la Gabon est en paix. Qu’il y a des acquis à consolider et que pour ce faire, il ne faut pas bousculer les choses. On intime subrepticement l’ordre à nos compatriotes du Gabon d’accepter le « changement sans la révolution ». Non, la paix est multidimensionnelle. La paix ne signifie pas seulement l’absence de conflit armé. Un pays où les personnes dorment le ventre vide, où les enfants n’ont pas accès aux soins et à l’éducation scolaire, où les infrastructures sont absentes, où les transnationales peuvent détruire l’environnement et piller les richesses du peuple, où des bases militaires stationnent depuis des décennies, où les dirigeants sont des pions soutenus mordicus contre le peuple n’est pas en paix. Des pays dont l’économie et la monnaie ainsi que les avoirs extérieurs sont détenus par les autres n’est pas en paix.
C’est là qu’il faut convoquer nos prédécesseurs : les [Sylvanus] Olympio, [Patrice] Lumumba, Nkrumah, Sekou Touré, Steve Biko, Um Nyobè, [Ernest] Ouandié, Félix Moumié, Anta Diop, Thomas Sankara, Tavio Amorin... Ils doivent même nous inspirer dans nos initiatives. Car, le combat n’a pas abouti ; il n’est pas achevé. Depuis leur tombe, il faut leur demander la passation du flambeau. A notre génération de se montrer digne de marcher dans leur sillage afin que leur mort ne soit pas vaine et rompre définitivement avec les indépendances fictives qui servent à imposer au peuple noir des pions de la trempe de Gnassingbé et fils, de Bongo et fils et d’autres encore ... au travers desquels l’humiliation et le saccage de l’Afrique se perpétuent.
Rodrigue KPOGLI, 3 septembre 2009
Source : Jeunesse Unie pour la Démocratie en Afrique
NDR : Une illustration de la kleptocratie & de la Francafrique, les intérêts croisés des héritiers d’Omar Bongo dans l’économie du pays :
Les "PDG" du Palais du bord de mer.
Directrice du cabinet présidentiel, Pascaline Bongo représente l’Etat au conseil de plusieurs grandes entreprises de la place - notamment Total Gabon, dont elle est la vice-présidente - aux côtés de Fidèle Ntissi, trésorier payeur général et ancien directeur du cabinet privé du chef de l’Etat. Pascaline est aussi présidente de Gabon Mining Logistics (Bolloré) et administratrice de BGFIBank, Ceca-Gadis et Pizo Shell. Son frère, Ali Bongo, ministre de la défense qui supervise tous les achats d’armes et de fournitures militaires, préside l’Oprag (Office des ports et rades du Gabon) et est l’un des actionnaires de la compagnie aérienne Afrijet. Autre fils du défunt président, Christian Bongo, DG de la BGD (Banque gabonaise de développement), est également dans l’aviation avec Allegiance après avoir dirigé Gabon Airlines, autre fleuron familial. Directeur adjoint du cabinet présidentiel, Patrice Otha préside de son côté la BGFIBank.
BGFIBank, coffre-fort inexpugnable.
"Premier groupe financier de la zone Cemac", la BGFIBank, la banque favorite du bord de mer, a pris son envol sur les cendres de la défunte FIBA (ex-banque d’Elf Gabon). Elle dispose des filiales BGFIBank Congo (présidée par Jean-Dominique Okemba, neveu du président) et BGFIBank Guinée équatoriale, et a obtenu en février 2007 un précieux et discret pied-à-terre à Paris. Ses filiales et intérêts sont totalement imbriqués avec ceux de la Compagnie du Komo (lire ci-dessous) et d’Ogar Vie (assurances) d’Edouard Valentin dont la fille Sylvia "Najma" est l’épouse d’Ali Bongo. Dirigée par Henri-Claude Oyima, né à Ngouoni et petit-neveu du défunt président, BGFIBank a parmi ses actionnaires : Pascaline Bongo, Christian Kerangall, PDG de la Compagnie du Komo (25,01% de BGFI), Robert Boutonnet (Cie du Komo) - qui a créé dans les années 60 la Sogafric -, Delta Synergie (9,01%) qui regroupe aussi des intérêts de la famille, BGD (10%), le ministre Richard Auguste Onouviet, le groupe Carlo Tassara (9,5%) de Romain Zaleski (présent aussi dans Comilog/Eramet) et Marcel Abéké, administrateur DG de Comilog. Bref, un vrai jeu de bonneteau. BGFIBank réalise chaque année pour ses bienheureux actionnaires un résultat net compris entre 20 et 30 milliards F CFA.
La galaxie de la Compagnie du Komo.
La CDK, comme on la surnomme à Libreville, contrôle une dizaine d’autres entreprises dont la Sodim (auto, matériel TP et forestier), Sogafric Services (froid, plomberie et sécurité), SOGI (industrie), Solsi (informatique), Electra (équipements de bureau)… et détient des participations dans la SEEG (2,78%), Gaboa (11,43%), Setrag (7%), Maboumine (niobium, 20%), etc. En Afrique, la CDK est aussi présente en Angola (froid, ascenseurs et négoce), en Guinée équatoriale, au Tchad et en Afrique du Sud. En Europe, elle est actionnaire de la Société financière des Ternes qui contrôle cinq concessions Mercedes et le Bureau technique d’approvisionnement (BTA), ainsi que 50% du cabinet de conseil en informatique Artaud, Courthéoux et associés (ACA). Le groupe dépasse les 120 milliards F CFA de chiffre d’affaires annuel.
[1] Sur la la politique de la France en Afrique (Francafrique), consulter les deux excellents sites internet :
Stop-francafrique
Association Survie