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Deux scandales en Guadeloupe dans l’indifférence des medias
Le salaire exorbitant de la patronne de la SEMSAMAR
Le 1er scandale concerne la SEMSAMAR, et plus précisément le salaire exorbitant perçu par sa patronne, Mme Belenus-Romana, première Antillaise a être nommée directrice générale d’une société d’économie mixte de l’Outre-mer.
Titulaire d’une (simple) maîtrise en sciences et techniques de l’aménagement du territoire, cette antillaise a pris la direction de la société le 1er juillet 2009. Elle succède à M. Jean-Paul Fischer qui en avait les commandes depuis sa création à Saint-Martin en 1985. Le lièvre a été soulevé par la MILOS (Mission Interministérielle d’inspection du Logement Social.
Dans un pré-rapport , la MILOS relève que Mme Belenus-Romana perçoit un salaire « exorbitant » qui « apparaît sans lien avec sa performance et le niveau de risques de la société dont l’activité est centrée sur des secteurs dépendants de fonds publics au titre de mission d’intérêt général ». Voilà qui est clair ! Un salaire qui compte tenu des avantages variables tourne bon an mal an autour de1,5 million d’euros …pas mal dans une société qui a pour vocation le logement social !
Pour sa défense, l’intéressée fait valoir qu’elle a la même rémunération que son prédécesseur et qu’elle travaille beaucoup…Il ne manquerait plus qu’à ce prix elle flemmarde… Ce salaire est évidemment choquant et on s’étonne que la MILOS ait attendu si longtemps pour dénoncer un tel abus.
Quelles bonnes fées protégeaient le précédent patron de la SEMSAMAR ?
Un sous-préfet suspendu de ses fonctions
Le second scandale touche une des plus hautes autorités de la préfecture. Le secrétaire général aux affaires économiques, M. Jean David Tibilan, l’homme le plus important de la préfecture de région après le préfet et le secrétaire général aux affaires administrativex a été, dans un silence assourdissant et dans l’indifférence des médias hexagonaux, suspendu de ses fonctions le 17 décembre dernier.
La presse régionale avait pourtant été prolixe lors de sa nomination. L’intéressé avait été promu à la tête de la DCCRF de la Guadeloupe (direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en 2009 après les évènements sociaux qui ont paralysé l’archipel durant 44 jours. Il était alors de bon ton d’« antillanniser » les cadres et M. Tibilan étant Martiniquais a bénéficié de cette opportunité. En octobre 2010, l’intéressé, âgé de 57 ans, était curieusement promu sur place sous-préfet chargé des fonctions de secrétaire général aux affaires économiques. Cette nomination faisait l’effet d’une mini-révolution à valeur symbolique forte.
Mais « la roche tarpéienne est près du Capitole ». Coup de bombe : deux ans après presque jour pour jour, à la suite d’une mission de l’inspection générale de l’administration M. Tibilan est suspendu de toutes ses fonctions par arrêté du secrétaire général du gouvernement. Le symbole est mis à mal…
La suspension est une mesure conservatoire et provisoire dont la durée ne peut excéder 4 mois. Elle ne peut intervenir qu’en cas de faute grave ou d’infraction pénale de droit commun. Il est question ici de détournements de fonds européens, d’attribution de subventions à des bénéficiaires non éligibles. Le bureau du sous-préfet est placé sous scellées.
Ce délai de 4 mois doit être mis à profit par l’administration pour mener à son terme la procédure disciplinaire qui implique de soumettre le cas au conseil de discipline et de prendre la sanction appropriée, laquelle peut aller jusqu’à la révocation. Si les faits en cause sont de nature délictuelle, le procureur de la République aura normalement dû être saisi Il reste à espérer que cette affaire embarrassante ne soit pas étouffée !
Le remplacement du préfet par une préfète originaire de Guadeloupe, Mme Marcelle Pierrot
Est-ce dans ce contexte inédit qu’est intervenu le limogeage du préfet Amaury de Saint Quentin, en poste depuis moins de 18 mois, et la nomination, contraire aux usages en vigueur d’une enfant du pays, Mme Marcelle Pierrot, âgée de 63 ans, ci-devant préfète des Vosges depuis 15 mois à peine et qui sera atteinte par la limite d’âge le jour de ses 65 ans, à la fin de l’année prochaine.
Sa nomination sonne comme le retour de l’enfant prodigue et vient confirmer la détermination du gouvernement d’antillaniser l’encadrement de l’administration dans les DOM et en particulier dans la turbulente Guadeloupe. Les préfets sont des fusibles, c’est bien connu et il peut légitimement être fait grief au patron de M. Tibilan de lui avoir laissé la bride sur le cou, d’autant qu’il manquait totalement d’expérience au poste délicat qui lui a été confié… Peut-être le préfet a-t-il payé aussi la légèreté, sanctionnée par le tribunal administratif qui a annulé ses arrêtés, avec laquelle il a autorisé les l’épandage aérien des bananeraies en dérogeant au principe d’interdiction posé par une directive européenne de 2009 et, en droit interne, par le code rural et des pêches maritimes…
Le choix de désigner une femme et, qui plus est, une Guadeloupéenne à la tête de l’Etat dans le département-région de Guadeloupe a incontestablement aussi valeur de symbole. Cette femme qui est diplômée de l’IEP de Bordeaux et qui a commencé sa carrière comme attachée de préfecture a été intégrée dans le corps préfectoral à 46 ans après 20 ans de bons et loyaux services.
En 17 ans de carrière dans le corps préfectoral, elle a sillonné la France hexagonale, occupant successivement, outre des fonctions de chef de bureau en administration centrale, les fonctions de directeur de cabinet (3 postes en 2 ans), de sous-préfet territorial (Arles et Lunéville), de secrétaire général (préfecture de la Somme), de préfet délégué à l’égalité des chances (moins d’un an) avant d’être nommée préfète du Lot (en 2007), puis du Tarn et des Vosges. Son point fort est sans conteste la diversité de son expérience : elle a exercé toutes les fonctions et connaît la France du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest. Elle est rompue au métier et en connaît toutes les ficelles. Elle est enfin précédée d’une réputation de grande rigueur. Ceux et celles qui pensent pouvoir l’instrumentaliser risquent d’en être pour leurs frais !
Son point faible est peut-être une certaine instabilité qui interroge sur les empreintes qu’il est possible de laisser en occupant autant de postes aussi peu longtemps. Elle a 23 mois pour agir. C’est peu mais c’est beaucoup par comparaison avec ses prédécesseurs. Il faut remonter en effet aux années 90 pour trouver 2 préfets ayant exercé en Guadeloupe plus de 2 ans (Jean Fedini de 96 à 99 et Jean-François Carenco de 99 à 2002). Par la suite, la Guadeloupe a usé 6 préfets en 10 ans ! Ce n’est pas sérieux…La crédibilité de l’Etat en souffre et sa capacité à régler les problèmes est mise en doute.